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21 décembre 2020

Enfants et familles en situation de précarité : retour sur la journée nationale de la Fédération des acteurs de la solidarité

Les 3 et 10 décembre dernier, la Fédération des acteurs de la solidarité a organisé en visioconférence un événement « Enfants et familles en situations de précarités : quels impacts de la crise sanitaire et sociale de 2020 et quelles perspectives pour la lutte contre la pauvreté ».

Les acteurs de la lutte contre l’exclusion font le constat depuis plusieurs années d’une paupérisation croissante des familles avec enfants et d’un accès de plus en plus complexe au logement, et à l’hébergement. La Stratégie de lutte contre la pauvreté, mise en œuvre depuis 2018, avait en particulier pour objectif de répondre à cette précarisation des enfants et des jeunes et une évaluation de l’impact des mesures adoptées est aujourd’hui nécessaire. En 2020, la crise due à l’épidémie de Covid 19 a fortement touché les ménages les plus précaires et provoquera le basculement de nombreuses personnes sous le seuil de pauvreté.

Ces deux demi-journées avaient pour but, trois ans après le lancement de la stratégie pauvreté, et suite à une crise sanitaire et sociale dont les conséquences ne peuvent pas encore être entièrement mesurées, de rassembler des élus, acteurs associatifs et institutionnels afin de réfléchir à la manière d’ajuster et de déployer avec l’ampleur nécessaire la politique de lutte contre l’exclusion et la précarité des enfants et de leurs familles.

Retour sur le contenu de la journée nationale

Cet événement a été organisé en deux demi-journées : le 3 décembre était consacré à l’évaluation des impacts de la crise traversée en 2020 sur les enfants et les familles et à une discussion sur la prise en compte de ces conséquences par les politiques publiques qui leurs sont dédiées ; le 10 décembre était consacré à des ateliers thématiques.

Jeudi 3 décembre : matinée d’interventions et table-ronde sur les effets de la crise

 

Vous pouvez accéder à l’enregistrement de la demi-journée du 3 décembre  en vous inscrivant au lien suivant : Webinaire Enfants et familles en situation de précarité – 1ère partie | Fédération des acteurs de la solidarité (livestorm.co).

 

Pascal Brice, président de la Fédération des acteurs de la solidarité, a ouvert cette demi-journée en soulignant que la pauvreté des familles constitue un sujet de travail de longue date de la FAS, en particulier parce ce qu’elle tend à enfermer les enfants dans des situations de déterminismes sociaux extraordinairement lourds.

Sandrine Mörch, députée et présidente de la commission d’enquête pour mesurer et prévenir les effets de la crise du covid-19 sur les enfants et la jeunesse est ensuite intervenue pour présenter les travaux de cette commission, dont la rapporteure est la députée Marie-George Buffet. Le rapport final sera très prochainement disponible sur le site de l’Assemblée nationale. Elle a en particulier insisté sur le fait que la commission s’est attachée à écouter la parole des enfants et des jeunes dans le cadre de ses auditions et de ses travaux, ce qui fait écho à la thématique du rapport annuel du Défenseur des droits sur les droits des enfants, consacré en 2020 à la prise en compte de la parole de l’enfant (consulter l’article relatif à ce rapport publié sur le site internet de la FAS). Elle a notamment évoqué les impacts psychologiques de la crise sanitaire sur les enfants et les jeunes, le fait que le repli sur la cellule familiale avait pu représenter à la fois une opportunité de retrouvailles pour certaines familles mais aussi un danger, avec le constat d’une augmentation des violences intrafamiliales encore difficile à mesurer, et que les inégalités de conditions de vie, notamment les conditions de logement, ont fortement impacté, au-delà de la qualité matérielle du confinement, la capacité des enfants à suivre leur scolarité. Elle a souligné les inégalités de prise en charge des mineurs non accompagnés sur les différents territoires, l’augmentation de la pauvreté en particulier pour les familles dépendant de sources de revenus très précaires et enfin le lien essentiel que représente le tissu associatif qui a assuré un lien direct avec les personnes ayant des besoins de première nécessité, tels que l’alimentation, ou d’autres besoins d’accompagnement.

Sur la base de ces premiers éléments de bilan, la table-ronde a permis de prolonger la discussion relative aux conséquences de la crise sur les enfants et les familles et d’évoquer les orientations des politiques publiques dédiées aux familles, à l’enfance et à la lutte contre la pauvreté pour faire face à l’ampleur de ces impacts. Arnaud Gallais, directeur général de l’association Enfance Présent, adhérente de la FAS, a mis l’accent sur l’engagement des professionnels impliqués au sein des établissements d’accueil des secteurs social, médico-social, de la petite enfance et sur le constat d’un défaut de coordination des acteurs qui a été particulièrement révélé pendant cette crise. Il a souligné le fait que les mères seules avec enfants sont particulièrement concernées par les conséquences de cette crise et par des situations de précarité et a partagé les éléments de bilan présenté par Mme Mörch relatifs à l’augmentation des violences intrafamiliales et les inégalités scolaires. Monique Dupuy, présidente de l’UDAF Hautes-Pyrénées et administrative de l’UNAF, a fait état de la fragilité économique induite par la crise, constatée par l’UNAF à travers les dispositifs de Points Conseil Budget avec notamment une explosion du budget alimentaire des familles et un poids des équipements numériques, et du caractère essentiel du travail social qui a permis de répondre aux besoins de première nécessité des familles et a réinventé ses pratiques afin de maintenir les liens avec les familles.

Annick Bouquet, maire adjointe à la mairie de Versailles et présidente de l’association des élus de la petite enfance des Yvelines, a relevé le fait que la crise a permis a beaucoup d’élus de prendre conscience de l’ensemble des difficultés sociales qui pouvaient être rencontrées par les familles et que cette priorité doit être travaillé de manière transversale, dans le respect des compétences des différents acteurs mais en lien étroit. Elle propose l’utilisation des schémas départementaux de services aux familles en tant qu’outil de travail permettant de rassembler et de mobiliser les différents acteurs parties prenantes, dont les acteurs associatifs. Le dépassement du fonctionnement en silos des différentes institutions et politiques publiques a été souligné par Francis Bouyer, adjoint à la déléguée interministérielle à la prévention et à la lutte contre la pauvreté, comme constituant un principe d’action fort de la stratégie de lutte contre la pauvreté lancée en 2018. Il a relevé que plusieurs départements et métropoles ont développé des initiatives spécifiques pour répondre aux enjeux de la précarité des familles monoparentales. Il est aussi revenu sur les aides financières adoptées dans le cadre de la crise actuelle et les mesures de l’acte II de la stratégie pauvreté notamment l’ouverture de places dédiées aux femmes sortantes de maternité, l’accompagnement de personnes hébergées à l’hôtel, le développement de projets d’aide alimentaire ou encore le nécessaire développement de dispositifs d’aller-vers. S’agissant des mesures de la stratégie pauvreté spécifiquement dédiées à la petite enfance, Vincent Mazauric, directeur général de la CNAF, a réagi sur la mise en place du bonus mixité et a indiqué que les objectifs d’ouverture de places en crèches ne seront pas atteints. Il a souligné que la CNAF s’était mobilisé pour assurer la continuité des financements des dispositifs d’accueil du jeune enfant durant la crise et a l’utilisation d’outils de la CNAF tels que le site monenfant.fr pour assurer une information aux familles durant cette période. Il a lui aussi insisté sur l’aspect crucial d’une meilleure coordination des acteurs en soulignant les initiatives mises en place pendant cette année 2020.

Les discussions ont porté sur le bonus mixité dans les établissements d’accueil du jeune enfant et plus largement sur la question de l’accueil et l’accompagnement des jeunes enfants, dont les enfants en situation de handicap, et la conciliation de la vie familiale et vie professionnelle, ainsi que sur les leviers permettant de favoriser la coopération entre les différents acteurs, soulignée par l’ensemble des intervenants à la fois comme un axe essentiel de travail mais aussi comme un apprentissage positif de la crise, dont le caractère urgent a provoqué dans certains territoires ces rencontres et ce travail en commun de nombreux acteurs.

Florent Gueguen, directeur général de la Fédération des acteurs de la solidarité, a conclu cette demi-journée en évoquant les réponses structurelles qui sont défendues par la FAS comme indispensables au regard du caractère durable de la crise sociale : revalorisation des minimas sociaux et construction de logements sociaux et très sociaux notamment, ainsi que l’accès à des titres de séjour de familles en situation administrative précaire. Il a par ailleurs insisté sur l’accès aux loisirs et à la culture en tant que composantes essentielles de l’accompagnement social fourni aux enfants et familles, axe qui est au cœur du programme Respirations porté en partenariat par les associations Cultures du Cœur, les Petits Débrouillards et la Fédération des acteurs de la solidarité.

Jeudi 10 décembre : ateliers thématiques

  1. Adaptation des structures d’hébergement et de logement à l’accueil et l’accompagnement des enfants et familles : animation et intervention par Maëlle Lena, chargée de mission Enfance Famille à la FAS.

Comment les structures d’hébergement et d’accompagnement vers le logement peuvent-elles adapter leur accompagnement aux enfants et familles accueillies ? Cet atelier a constitué un lieu d’échanges autour d’une analyse des besoins de ces enfants et familles, et de projets à mettre en œuvre pour assurer une prise en charge adaptée.

  1. Enfants et familles à la rue : maraudes mixtes : animation par Guillaume Chéruy, chargé de mission Veille sociale Hébergement à la FAS et interventions de Elisa Riano, codirectrice des programmes à ACINA et Sandrine Elie, cheffe de service à ACSEA

Les maraudes « mixtes », qui regroupent des acteurs de la veille sociale et de la protection de l’enfance se sont mises en place dans le cadre de la Stratégie Pauvreté. Entre réussites, difficultés et conditions indispensables de mise en œuvre, cet atelier a été l’occasion d’un premier bilan de cette mesure qui a fait l’objet d’une contractualisation par 17 départements.

  1. Accès aux loisirs et à la culture : l’exemple du programme « Respirations » : animation par Loriane Carracha, coordinatrice régionale du programme Respirations en région Occitanie et interventions de Magali Ref, Ccheffe de projet, Cultures du Cœur, Méliana Lalouani, déléguée Territoriale Seine-St-Denis, Les Petits Débrouillards, Alban Roblez et Lorenza Biancarelli, Agence de Recherches et d’Evaluation en Sciences Humaines (ARESH)

Voir la présentation du programme Respirations sur le site internet de la FAS.

  1. Partenariats entre les structures du social et les secteurs de l’ASE et du médico-social : animation par Alexis Goursolas, responsable du service Stratégie et Analyse des politiques publiques à la FAS et interventionas de Maud Weissleib, conseillère à la FEHAP et Jean-François Meira, adjoint au sous-directeur Enfance et Famille de la Direction générale de la cohésion sociale (DGCS)

L’atelier a permis des échanges autour des leviers de mise en place de partenariats entre les structures du secteur social et les secteurs de l’ASE et du médico-social afin de permettre le suivi et la prise en charge des personnes accompagnées.

  1. Droits de l’enfant : les faire vivre au sein des structures d’accueil et d’accompagnement : animation par Adrien Breger, chargé de mission Travail Social et Participation à la FAS et intervention d’Anne-Lise Denoeud, chargée Plaidoyer France et Expertise, UNICEF France.

Cet atelier a été l’occasion d’échanges de pratiques et réflexions autour des droits de l’enfant, et de modalités d’animation permettant de sensibiliser et faire connaitre ces droits aux enfants et familles accueillis dans les structures ou dispositifs d’hébergement et d’accompagnement. Plusieurs outils ont été évoqués : le site MyUNICEF de l’UNICEF France et le programme Educadroit du Défenseur des droits.