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11 avril 2018

Stratégie pauvreté : les rapports, en attendant les annonces

Le 15 mars dernier, à l’invitation d’Agnès Buzyn, Ministre des Solidarités et de la santé, et d’Olivier Noblecourt, délégué interministériel à la prévention de la pauvreté et la lutte contre la pauvreté des enfants et des jeunes, les résultats de la concertation organisée pour élaborer la stratégie de lutte contre la pauvreté ont été rendus publics. La Fédération attend désormais que le Président de la République s’empare de ces préconisations, pour saisir l’occasion de lutter structurellement contre la pauvreté.

Une concertation d’octobre à mars

Le 17 octobre dernier, le Président de la République, annonçait le lancement d’une concertation visant à concevoir une stratégie de lutte contre la pauvreté, en particulier des enfants et des jeunes. Mi-novembre, Olivier Noblecourt était nommé délégué interministériel et chargé de piloter cette concertation, sous l’égide d’Agnès Buzyn.

Cette concertation s’est notamment incarnée dans la mise en œuvre de six groupes de travail réunissant, pour un total de 5 réunions environ chacun, des acteurs institutionnels et associatifs mais aussi des parlementaires, des représentants d’associations d’élus locaux et des personnes en situation de précarité.

En plus de sa participation à trois de ces groupes, et d’avoir été auditionnée à un autre, la Fédération a contribué à l’ensemble de la concertation, notamment en se mobilisant au sein du collectif Alerte. Elle a ainsi pu rappeler ses principales propositions, notamment celles développées pendant la campagne présidentielle, mais aussi valoriser des initiatives d’adhérents et des projets d’expérimentation, et alerter sur les effets très négatifs pour les personnes précaires d’orientations budgétaires prises depuis le début du quinquennat.

110 propositions pour lutter structurellement contre la pauvreté

Les présidents des 6 groupes de travail ont présenté leurs rapports le 15 mars dernier. Ce sont en tout pas moins de 110 propositions qui ont été formulées, pour répondre à l’ambition présidentielle : trouver des solutions systémiques à la lutte contre la pauvreté, notamment en agissant en prévention, auprès des enfants de famille en situation de précarité.

Pour la Fédération, de nombreuses propositions répondent à cette ambition.

Ainsi, la volonté d’augmenter significativement le nombre de places d’accueil du jeune enfant et d’instaurer des logiques de bonus/malus permettant de renforcer la mixité sociale au sein des établissements d’accueil du jeune enfant, couplée à l’élaboration d’un référentiel sur la qualité d’accueil et le financement d’actions associatives d’accueil très qualitatif de familles en précarité, assurerait l’accès de toutes les familles à un mode d’accueil de qualité, favorisant le développement des enfants.

La création du parcours d’accompagnement des Jeunes vers l’Insertion, unifiant des dispositifs existant pour lier, sans limite de durée, accompagnement global et garantie de ressources pour tous les jeunes précaires représenterait une réelle amélioration de la garantie jeunes, et offrirait une solution plus sécurisante aux jeunes. Le développement des initiatives de formation et d’apprentissage employant des pédagogies adaptées aux jeunes décrocheurs (écoles de production, écoles de la deuxième chance, micro-lycées etc) et l’abondement du compte personnel de formation de ces jeunes apporteraient eux une réponse aux trop nombreuses sorties du système scolaire sans qualification.

Le renforcement de la médecine à l’école par le développement de partenariats avec la médecine de ville, le développement quantitatif et qualitatif des dispositifs médico-sociaux (lits halte soin santé, lits d’accueil médicalisés, PASS, Equipes mobiles psychiatrie précarité) et la fusion de l’aide médicale d’Etat dans la protection universelle maladie apporteraient eux des réponses aux problématiques de santé rencontrées par les personnes en précarité.

Citons encore, sans être exhaustif, l’augmentation du budget de l’insertion par l’activité économique et de l’accès à la formation des salariés en insertion, la réduction des nuitées hôtelières et la relance d’un programme d’humanisation de l’offre d’hébergement, ou enfin, la contractualisation avec les caisses de protection sociales et conseils départementaux pour lutter contre le non recours.

La proposition, portée par la Fédération dans le cadre du projet de loi « asile/immigration », d’octroi d’un titre de séjour aux personnes ni régularisables ni expulsables a également été proposée dans l’un des rapports.

L’urgence de s’en saisir et de mettre en place une politique globale de lutte contre la pauvreté

Emmanuel Macron devrait annoncer fin avril la stratégie de lutte contre la pauvreté. La Fédération attend de lui qu’il reprenne ces propositions positives.

Elle espère également que d’autres mesures, non prévues par les rapports, soient mises en œuvre rapidement, telles que la revalorisation du RSA, la construction massive de logements sociaux et très sociaux, l’encadrement des loyers en zone tendue ou encore la généralisation du tiers payant.

Elle pointe enfin la nécessité de corriger des orientations budgétaires prises en 2018, contraires à l’objectif de lutte contre la pauvreté. La réduction du nombre d’emplois aidés et de postes d’insertion et la réforme de la tarification des centres d’hébergement et de réinsertion sociale et les baisses massives de crédits qui y sont associées frappent en effet très durement les plus précaires.

Seule une politique globale forte, appuyée sur une stratégie ambitieuse mais irriguant également l’ensemble des politiques publiques, apportera une réponse à l’augmentation massive de la pauvreté en France sur ces dix dernières années. Ce sont en effet près de 9 millions de personnes qui vivent aujourd’hui sous le seuil de pauvreté, soit un million de plus qu’en 2008.

zipTélécharger les rapports des groupes de travail