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22 novembre 2021

Politique familiale : revue des dépenses socio-fiscales par l’IGAS et l’IGF

L’inspection générale des finances et l’inspection générale des affaires sociales ont été missionnées par le ministre des solidarités et de la santé et le ministre délégué des comptes publics afin de réaliser une revue des dépenses de la politique familiale en France. Ce rapport propose une évaluation des différents dispositifs fiscaux et sociaux contribuant aux différents objectifs de la politique familiale et évoque de possibles scénarios d’évolution.

Les deux inspections rappellent tout d’abord des éléments historiques et de définition de la politique familiale, « un des piliers du modèle social français ». Les quatre objectifs affichés de cette politique sont : la compensation des charges de l’enfant (redistribution horizontale entre les personnes sans enfants et les personnes avec enfant(s)), le soutien aux familles vulnérables (redistribution verticale entre les personnes les plus aisées et les plus pauvres), la conciliation de la vie privée avec la vie professionnelle et la garantie de la viabilité financière de la branche famille de la Sécurité sociale.

Le périmètre des dépenses socio-fiscales retenu par la mission s’élève à 63 milliards d’euros. Il prend en compte les dispositifs suivants :

  • Pour les dispositifs fiscaux : le quotient familial, les crédits d’impôt pour frais de garde des enfants de moins de 6 ans, pour l’emploi d’un salarié à domicile et le crédit d’impôt famille (CIFAM), la réduction d’impôt pour frais de scolarité dans l’enseignement secondaire, l’abattement sur la taxe d’habitation,
  • Pour les dépenses d’intervention – enseignement secondaire : les bourses en collège et lycée,
  • Pour les prestations d’entretien de l’enfant : les allocations familiales (AF), le complément familial (CF), l’allocation de rentrée scolaire (ARS), l’allocation de soutien familial (ASF),
  • Pour les prestations d’accueil du jeune enfant (Paje) : la prime à la naissance ou à l’adoption, l’allocation de base (AB), la prestation partagée d’éducation du jeune enfant (PrePare), le complément de libre choix du mode de garde (CMG),
  • Pour les suppléments pour enfant à charge des prestations de solidarité : les aides au logement (AL), le revenu de solidarité active (RSA), la prime d’activité (PPA), l’allocation adulte handicapé (AAH),
  • Pour les autres leviers de financement : le fonds national d’action sociale de la CNAF et Caf, les communes et EPCI, et les aides aux familles vulnérables versées par les CCAS et départements non prises en compte du fait de données non disponibles.

La gouvernance est partagé entre différentes administrations au niveau central (direction de la Sécurité Sociale, direction générale de la cohésion sociale, direction de la législation fiscale) ainsi que la CNAF, la CCMSA, et entre différentes collectivités (départements et communes). Il n’existe toutefois pas de « chef de file » unique de la politique familiale.

Le rapport note que la dynamique démographique de la France reste la meilleure d’Europe mais tend à diminuer : le taux de natalité est en 2020 de 1,83 enfant/femme et était à 2,03 en 2010, avec des impacts sur le modèle social français qui doivent être pris en compte.

Les deux inspections soulignent les importants effets redistributifs des dispositifs socio-fiscaux actuels qui se font horizontalement (entre ménages sans enfant à charge et ménages avec enfant(s)) et verticalement (entre ménages aisés et ménages pauvres). La politique familiale poursuit donc bien un objectif de soutien aux familles vulnérables, qui a eu tendance à se renforcer ces dernières années, dans la logique d’un « universalisme proportionné ». Toutefois, le rapport indique aussi que la politique familiale se distingue par sa complexité, avec de nombreux dispositifs qui se superposent, et qui génèrent des effets de bord. Toute évolution marginale emporte donc des effets difficiles à prévoir, et viendrait fragiliser la stabilité de la politique, considérée comme un facteur important dans le soutien à la natalité, du fait de la confiance et de la meilleur appropriation par les ménages de dispositifs existants depuis plusieurs années.

L’IGAS et IGF soutiennent une réflexion sur une refonte ambitieuse du dispositif socio-fiscal existant, qui serait centrée sur la redistribution horizontale entre ménages sans enfant et ménages avec enfant(s), et qui nécessiterait alors d’être articulée avec des dispositifs de redistribution verticale cohérents (le rapport fait en particulier référence aux travaux autour du revenu universel d’activité).

Ainsi cette revue des dépenses dresse le scénario de quelques évolutions paramétriques possibles mais insiste surtout sur la nécessité d’un renforcement de l’offre de service aux familles, et en tout premier lieu l’offre d’accueil du jeune enfant. Cette politique autour de l’accueil du jeune enfant combine trois éléments : le nombre de places d’accueil disponibles et le développement de l’offre d’accueil, un soutien financier aux familles et les dispositifs de congés parentaux. Le rapport ne manque cependant pas de pointer les fortes inégalités sociales et territoriales d’accès aux modes de garde.

Il formule les propositions suivantes, visant à améliorer les possibilité de recours aux modes de garde : à moyen-long terme, définition d’une compétence obligatoire du bloc communal (avec accompagnement financier nécessaire) pour avoir un chef de file bien identifié, et à court terme, renforcer les leviers d’action des Caf en faveur des modes de garde, développer l’attractivité des métiers de la petite enfance et la formation des professionnel.les, réduire le reste à charge des familles faisant appel aux assistantes maternelles (réforme du CMG), et soutien et création de dispositifs visant à proposer de manière cohérente un accompagnement socio-professionnel et un mode d’accueil du jeune enfant adapté.

La Fédération rejoint dans leur ensemble les propositions relatives au soutien aux modes d’accueil du jeune enfant et la nécessité de rendre cette accueil plus accessible, en particulier pour les familles les plus pauvres, ainsi que le besoin d’une articulation entre les objectifs insertion socio-professionnelle, égalité femmes-hommes et soutien au développement de l’enfant notamment via des solutions d’accueil collectif.  Elle soutien aussi certaines propositions dégagées par le Haut Conseil à la Famille à l’Enfance et à l’âge, notamment s’agissant des prestations sociales à destination des mères isolées (cf. article FAS « Actualités de la politique familiale : conférence des familles, recommandations HCFEA, accueil du jeune enfant en horaires atypiques et conciliation vie professionnelle-vie familiale »).