Retour à toute l'actualité

26 janvier 2021

La Cour des Comptes favorable à une accélération du Logement d’abord

La Cour des comptes a publié en ce début d’année son référé portant sur le plan quinquennal pour le Logement d’abord visant à saisir le Premier ministre sur cette question.

Le document propose dans sa première partie un constat du sans-abrisme que partage la Fédération. Ainsi, la Cour observe une massification du sans-abrisme depuis la dernière enquête de l’INSEE en 2012 et estime à 300 000 le nombre de personnes sans-domicile, à l’instar des récentes communications de la Fondation Abbé Pierre. Elle rappelle également la hausse constante du budget de l’État pour ce qui est de l’hébergement d’urgence, le parc important de logements sociaux en France (près de cinq millions de logements), pointe les difficultés d’accès au logement des personnes les plus précaires, faute de logements adaptés et d’accompagnement social suffisant, tout en affirmant qu’une politique efficace du Logement d’abord permettrait de faire des économies importantes à l’État.

La deuxième partie du référé présente brièvement les contours du Logement d’abord, les expériences antérieures au plan quinquennal pour le Logement d’abord, en s’appuyant notamment sur le dispositif « Un Chez soi d’abord », et décrit la mise en place du plan avant d’analyser ses premiers résultats. La Fédération regrette quelque peu que les initiatives associatives qui ont déclenché les expérimentations au début des années 90 et qui se sont poursuivies dans le temps, sans attendre que les politiques publiques ne les suivent, ne soient pas plus clairement relevées. Il convient en effet de rappeler que le logement d’abord est avant tout issu de la société civile et de la volonté du secteur associatif de mieux prendre en charge et accompagner les personnes sans domicile.

La Cour des comptes estime ensuite que le plan quinquennal pour le Logement d’abord n’a pas eu les résultats escomptés dans ces premières années, ce malgré une dynamique partenariale intéressante dans les territoires de mise en œuvre accélérée et l’accès au logement de 150 000 personnes sans domicile. La Cour considère en effet que le changement d’échelle n’a pas encore eu lieu, que les avancées sont plus de l’ordre de l’expérimentation que du changement systémique et prend en exemple le non-respect par les différents réservataires des obligations légales de relogement des publics prioritaires fixées par la loi ALUR et la loi Egalité et Citoyenneté et les difficultés pour les SIAO d’orienter les ménages vers le logement.

Afin d’accélérer le déploiement du Logement d’abord, l’instance plaide pour une meilleure connaissance des publics et de leurs besoins, une amélioration dans l’orientation vers le logement, une meilleure coordination des mesures d’accompagnement, un recentrage de l’hébergement vers une fonction de mise à l’abri et une politique de prévention des ruptures plus ambitieuse.  Pour atteindre ces objectifs, la Cour insiste sur quatre recommandations :

  • faire de l’accès au logement des ménages sans domicile une priorité en l’inscrivant dans les différents documents conventionnels et contractuels (CIL, PLH, CIA, PDALHPD, CUS,…) et en se donnant les moyens de suivre cet objectif ;
  • revoir le modèle du logement social en France s’agissant des dispositions relatives aux locataires du parc social ou encore en appliquant un taux d’effort plancher ;
  • modifier les règles des attributions de logements sociaux afin de prioriser les ménages sans domicile ;
  • transformer l’hébergement d’insertion en logement ou logement adapté et centrer l’hébergement d’urgence vers une réponse de mise à l’abri.

La Fédération des acteurs de la solidarité partage pour partie l’analyse du manque de cohérence entre le plan quinquennal porté par l’État et les principes fondamentaux du Logement d’abord, la nécessité de renforcer les SIAO dans leur mission d’accès au logement et la difficulté de passer d’une démarche qui paraît expérimentale à une échelle plus grande. Elle défend également les conditions de réussite pointées par ailleurs à savoir « l’adaptation de l’offre de logement aux besoins des personnes concernées, et un accompagnement pluridisciplinaire (social, médical, juridique, humain, etc.) ». La Fédération y ajoute la nécessité de faire avec les personnes concernées, en se basant sur leur libre adhésion, leur choix, ainsi que la volonté de penser cette philosophie comme étant adaptable à tous les publics, dans un principe d’inconditionnalité.

Toutefois, comme cela a été affirmé lors de l’audition de la Fédération par la  Cour des comptes pour les besoins de ce référé, il convient d’exprimer de vifs regrets quant à la volonté affichée d’opposer l’hébergement et le Logement d’abord, en s’inscrivant dans un plan de réduction drastique de l’hébergement à des fins d’économies budgétaires. Dans le cadre du Logement d’abord, nous défendons l’idée que l’hébergement d’insertion, qui est le plus qualitatif, a toute sa place et que ses variétés de déploiement permettent de répondre à un maximum de besoins. La forte plus-value de l’hébergement d’insertion provient de l’accompagnement social qui permet la réussite des parcours d’insertion. En revanche, il convient d’humaniser les centres collectifs, d’accompagner les structures vers des formes de bâtis et des pratiques se rapprochant le plus possible du logement de droit commun et de développer le CHRS hors les murs, le tout dans une logique du Logement d’abord.

En outre, une partie des personnes sans domicile fixe ne dispose pas d’une situation administrative leur permettant d’accéder au logement social ou accompagné. Compte tenu de la nécessité de respecter le principe légal d’accueil inconditionnel des personnes à la rue dans l’hébergement et de la persistance d’un nombre très important de personnes n’obtenant pas d’hébergement via le 115, la Fédération est convaincue de la nécessité d’un renforcement structurel de l’offre d’hébergement pérenne doté d’un accompagnement.