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21 avril 2017

Interview croisée de Cathy Cerdan et de Nadia Imbernon

Cathy Cerdan et Nadia Imbernon sont toutes deux salariées de l’association APIJE, l’une des 16 structures expérimentatrices, la première est chargée de développement projet et la seconde chef de service commercial. Elles reviennent sur leur engagement dans leur projet SEVE.

Pouvez-vous présenter l’association pour laquelle vous travaillez, et quel est votre rôle ? 

Cathy Cerdan : « L’APIJE est une association intermédiaire (AI) qui a deux services principaux :   le service Mise à disposition de personnel (MAD) et le service d’accompagnement de bénéficiaires dans le cadre de prestations telles que le Revenu de solidarité active par exemple. Le siège de l’APIJE est situé à Montpellier et nous avons différentes antennes dans tout le département de l’Hérault. Au total, près de 3 000 personnes bénéficient de nos services dont 650 salariés en insertion. Nous sommes 60 salariés permanents pour mettre en œuvre cette mission.

Au sein de l’APIJE, je suis chargée de développement projet depuis 3 ans après avoir été conseillère en insertion professionnelle. Mon métier ? Répondre aux appels d’offre du territoire sur tout ce qui concerne la méthodologie de projets : comment développer l’accompagnement de la personne selon le cahier des charges proposé, définir une durée de parcours, etc…»

Nadia Imbernon : « Je suis chef de service commercial depuis 8 ans au sein de l’APIJE notamment pour prospecter et fidéliser une clientèle de professionnels : entreprises, associations, collectivités locales. Nous avons actuellement 650 clients dont 250 professionnels. Nous travaillons par exemple sur un marché public avec le groupe Nicollin, entreprise d’envergure sur le territoire qui nettoie et collecte les déchets ménagers. »

Pourquoi avoir choisi de s’engager dans l’expérimentation SEVE ? 

C. C. : « Nous nous sommes beaucoup développés ces dernières années, notre effectif de salariés permanents a doublé et il devenait urgent de (ré)apprendre à travailler tous ensemble avec de nouveaux outils de travail, de nouvelles méthodes, de nouveaux objectifs.

Par ailleurs, classiquement dans une AI, le service en charge de la relation entreprises et le service d’accompagnement sont deux services bien distincts. Or nous devons travailler main dans la main pour pouvoir proposer une offre de services globale aux entreprises. SEVE nous accompagne là-dessus ! »

N. I. : « L’enjeu pour notre structure, c’est la mutualisation de nos pratiques professionnelles, de notre réseau, de nos outils, puisque la collaboration durable avec l’entreprise doit être l’affaire de tous dans un objectif défini d’insertion durable. J’avais animé des groupes de travail et construit des outils par le passé mais comme cela ne s’inscrivait pas dans une dynamique de conduite de changement, cela n’avait pas fonctionné. Nous n’étions pas dans une dynamique de réorganisation telle que soutenue dans l’expérimentation SEVE.

SEVE, c’est finalement ça : on apprend à travailler ensemble, à échanger et à construire des outils, pour un seul objectif : l’insertion durable !

Moi, je vois déjà des premiers effets : nous essayons tous d’avoir un discours commun pour présenter l’APIJE auprès des entreprises. Je ne présente plus mon métier de chef de service commercial, je présente l’APIJE dans sa globalité avec tous ses projets et son offre de service.  »

C. C. : « À l’APIJE, nous avons la particularité de travailler avec 80% d’entreprises et 20% de particuliers ce qui est plutôt rare pour une AI. Nous avons donc poussé ce travail de relation avec les entreprises mais nous pouvons encore faire mieux ! Nous ne connaissons pas encore toutes les entreprises de notre territoire. »

En quoi le projet SEVE va-t-il vous aider au quotidien ? 

N. I. : « Avant le démarrage de la formation, tout était très scindé, chacun faisait un peu à sa manière. Par exemple, j’étais la seule à aller à la rencontre des entreprises puisque je suis sur un poste de commercial. Maintenant, nous changeons les pratiques, même les conseillers en insertion professionnelle sont amenés à contacter les entreprises. Notre objectif ? Permettre aux personnes de trouver un emploi durable, et pour y arriver nous devons mutualiser tous nos contacts entreprises. Effectivement, j’ai dans mon dossier-client des entreprises à qui je ne vais pas proposer de la mise à disposition de personnel mais qui pourraient recevoir des personnes en stage.

Moi, je rassemble tous les contacts, quand ils ont besoin, les collègues font appel à moi pour me parler des projets professionnels des personnes et les conseiller. J’ai un rôle pivot dans la relation entreprise. »

C. C.: « Aujourd’hui, je me forme sur le contact entreprise, et globalement sur toutes les missions proposées par l’AI. J’ai aussi pris la mesure de toutes les possibilités de mises en relation avec les entreprises et cela m’aide dans mon métier au quotidien. Nous proposons différentes formes de lien entre les salariés et les entreprises telles que des job café, des entretiens relais, des formats individuels ou collectifs.

SEVE nous permet aussi de mieux travailler en équipe. Lors des ateliers collectifs, nous préparons ensemble. Lorsqu’il y a une visite entreprise à réaliser, c’est le binôme CIP et chargée de gestion qui se déplacent pour apprendre mutuellement.

Je vais également me déplacer avec Nadia pour rencontrer différentes organisations professionnelles pour faire la promotion de notre activité : l’UIMM, la CGPME et la Confédération de l’Artisanat des petites Entreprises du Bâtiment. »

 Quelles actions semblent être pour vous les plus efficaces pour développer des liens avec l’entreprise ? 

C. C. : « Dans l’immédiat, nous avons développé l’action job café. Un job café fait venir des entreprises d’un même secteur d’activité au sein même de l’APIJE après avoir préparé les bénéficiaires à leur rencontre. Nous parlons des métiers en tension, des envies des salariés, des conditions de travail, etc.. L’objectif est de sortir de cette rencontre avec un objectif par salarié, mesuré à ses besoins, à son rythme. Chacun de nos 6 sites peut mettre en place cette action facilement.

À ce stade, nous avons de très bons retours, aussi bien du côté des entreprises que des participants. Ces rencontres sont stimulantes, motivantes. Pour d’autres, cela relance la machine pour aller vers l’entreprise. »

SEVE, c’est aussi un collectif de professionnels au service de l’insertion professionnelle. Pouvez-vous nous en dire plus ?

C. C. : « Grâce à SEVE, nous rencontrons d’autres structures, d’autres métiers, et d’autres professionnels. C’est vraiment très enrichissant. À ce stade, notre seul regret est d’être la seule AI du territoire impliquée dans SEVE. Une autre association intermédiaire aurait pu nous donner un autre point de repère..

Nous pouvons en revanche déployer une force de frappe commune puisque nous créons tous une nouvelle façon de travailler, plus collective, plus systématique.

Chacun bouge ses pratiques dans SEVE, par exemple les conseillers en insertion ont adapté leurs méthodes de travail notamment sur le fait de ne plus démarrer l’accompagnement par la levée des freins mais par la création de lien avec les entreprises.

De la même manière, des chargés de gestion avaient des craintes à proposer certains profils aux entreprises. Au fur et à mesure des sessions de formation, la vision change, des situations sont essayées. »

18 mois de formation, n’est-ce pas trop long ?

C. C. : « Je n’ai pas le sentiment que ce soit trop long puisque nous sommes sur un changement de vision et de pratiques qui doivent perdurer dans l’association. Si la formation ne durait que trois jours, nous pourrions nous laisser rattraper par nos anciennes habitudes alors que là, nous maintenons le rythme et la méthode dans la durée avec des piqures de rappel lorsque nous sommes en session de formation.

Comme nous sommes plusieurs antennes, il y a certains sites qui sont plus rapides que d’autres, donc nous avons aussi besoin de ce temps pour avoir une cohérence sur l’ensemble de notre association et des pratiques professionnelles.

De mon côté, j’ai encore du travail à accomplir, en tant que chargée de développement sur l’APIJE, moi-même je suis éloignée des entreprises, et je dois pouvoir aussi les connaitre et maitriser leurs besoins pour mieux répondre aux appels à projets. »

Comment une entreprise d’insertion sollicite-t-elle une nouvelle entreprise ?

N. I. : « Je fais de la prospection ciblée, je vais rencontrer de nouvelles entreprises pour connaitre leurs pratiques de recrutement et m’adapter à leurs besoins en proposant la partie de nos activités qui correspond à ce qu’elle recherche.

Les chargés de gestion ont, eux aussi, une bonne connaissance des entreprises de leur propre territoire. Les conseillers rentrent directement en contact avec les clients pour proposer différentes mises en lien qui correspondent au projet des salariés en insertion. Eux vont chercher à élargir le nombre d’entreprises avec lesquelles ils vont pouvoir proposer des mises en situation en entreprises plutôt que de solliciter toujours la même. Une période de mise en situation professionnelle, c’est aussi une bonne occasion de nouer un premier contact avec l’entreprise, pour découvrir notre métier, et si besoin refaire appel à nous dans le cadre d’une prestation. »

Site internet : apije.org

Page facebook : https://www.facebook.com/associationapije/